Paul-Henri NARGEOLET

Paul-Henri NARGEOLET, Conseiller technique en recherches sous-marines

Spécialiste de l’épave du Titanic. Directeur du programme de recherches sous-marines pour Premier Exhibitions, RMS Titanic Inc.

Paul-Henri NARGEOLET est né le 2 mars 1946 à Chamonix-Mont-Blanc (Haute-Savoie). Il entre dans la Marine Nationale en 1964 dans laquelle il passe 22 ans en tant qu’officier spécialisé dans le déminage, la plongée et l’intervention sous–marine profonde.

Entre 1976 et 1978, il est nommé commandant du Groupement de Plongeurs Démineurs de Cherbourg dont l’une des missions principales est de rechercher et de neutraliser les mines ou engins explosifs immergés ou dissimulés sous le sol.

Passionné par les épaves, P-H NARGEOLET ne tarde pas à s’intéresser au bâtiment confédéré Alabama coulé au large de Cherbourg, en 1864 (pendant la guerre de Sécession), par le navire fédéral Kearsarge.

Il reconstitue l’histoire de cette bataille navale et tente, sans succès, de localiser l’épave avec un sondeur graphique. Il ne peut cependant mener cette aventure à son terme car il est affecté au Groupe d’intervention sous la mer (GISMER) basé à Toulon… mais son histoire avec l’Alabama ne s’arrêtera pas là…

Pilote de sous-marins d’intervention au GISMER

Dans le cadre de ses missions de pilote de sous-marins (Griffon…) au sein du GISMER, il est régulièrement envoyé aux quatre coins du monde pour des missions délicates, notamment au Liban, pour remonter à la surface des épaves d’avions ou d’hélicoptères français abattus. Il récupère ainsi des corps de soldats, des armes et remonte parfois des éléments susceptibles de déterminer les causes du crash ou l’origine d’un missile.

Au sein de la Marine nationale, Paul-Henri NARGEOLET réalise également des missions internationales : il localise ainsi l’avion DHC-Buffalo qui s’est abîmé au large de Dakar, le 27 mai 1979, avec 12 personnes à son bord, dont plusieurs membres du gouvernement mauritanien.

Dans un registre plus léger, durant l’Été 1980, il contribue à la découverte de l’épave romaine baptisée Sud-Perduto dans l’est des bouches de Bonifacio, au sud de l’îlot de Perduto, à 70 mètres de profondeur, en tant que pilote du sous-marin de poche Griffon.

Des compétences au service de l’archéologie sous-marine

Flûte à la voile, « Dessins de tous les bastimens qui naviguent sur la Méditerranée » par Jean Jouve (1679). — Flûte à la voile, "Dessins de tous les bastimens qui naviguent sur la Méditerranée" par Jean Jouve (1679).

Dans le même temps, sa passion pour l’archéologie sous-marine le conduit à devenir membre actif du Groupe de Recherche en Archéologie Navale (GRAN) présidé par Philippe TAILLIEZ.

C’est dans ce cadre qu’il participe à la découverte et/ou aux fouilles de nombreuses épaves mythiques comme :

Le navire de la Marine Impériale Russe, Slava Rossii, fouillé au mois d’août 1980 et août 1981, qui fît naufrage en 1780 au large de l’Île du Levant.
La flûte royale, La Baleine, coulée par la flotte anglo-hollandaise devant Port-Cros en 1710 et fouillée en avril 1980.
La nave Gênoise Lomellina qui a sombré en 1516 dans la baie de Villefranche-sur-Mer sondée puis fouillée entre 1982 et 1990 (en discontinu).
La frégate de la Marine française, Magenta, coulée dans le port de Toulon en 1875 et sondée puis fouillée entre 1994 à 1998 (en discontinu).

De recherches en découvertes

L’astronaute Buzz ALDRIN et P-H NARGEOLET en plongée à bord du Nautile

En 1986, Paul-Henri NARGEOLET est nommé Responsable des sous-marins d’intervention profonde Cyana et Nautile à l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer).

Parmi ses missions à l’Ifremer, il est chargé, entre autres :

d’effectuer 9 plongées sur l’épave de l’Alabama, à bord du sous-marin d’observation VAR SO 450 (conçu par la Comex). Découverte le 30 octobre 1984, cette épave, qui fascine Paul-Henri NARGEOLET, connaît sa première campagne d’expertise du 9 mai au 24 juin 1988.
de localiser les épaves d’avions abîmés en mer : il remonte ainsi, en 1991, les boîtes noires du DC-9 de la compagnie Itavia qui s’est crashé 10 ans plus tôt au nord de la Sicile avec 81 personnes à son bord.

Les premières plongées sur l’épave mythique du Titanic

En 1986, l’Ifremer lui propose de diriger les plongées du Nautile sur l’épave du Titanic.

Du 25 juillet au 9 septembre 1987, P-H NARGEOLET réalise avec ses équipes les premières plongées sur l’épave mythique, remontant à la surface des objets dispersés dans le champ de débris.

épave © Collection PH Nargeolet (2) — © Collection PH Nargeolet

Cette expédition est un succès : 1 892 objets sont confiés à Titanic Ventures (future RMS Titanic, Inc.), régisseur exclusif de l’épave du Titanic. Ils seront restaurés par le laboratoire EDF R & D Valectra, basé à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis).

« Nous sommes arrivés sur l’avant : la très belle partie du bateau. C’est vraiment la partie extraordinaire de l’épave. Quand on est dans le sous-marin, on n’arrête pas de parler de techniques, de ce qu’on fait, de ce qu’on voit etc. Mais là quand nous sommes montés le long de la coque sur la plage avant du Titanic, le silence s’est fait. »

P-H NARGEOLET participe également à l’expédition coordonnée par Ifremer et RMS Titanic Inc. qui se déroule au printemps 1993. Plus de 800 objets provenant du champ de débris sont remontés à la surface.

Durant l’été 1994, P-H NARGEOLET coordonne une fois encore les 18 plongées du Nautile sur le site de l’épave. Plus de 1 000 objets dont des effets personnels de passagers (jumelles, chaussures…) sont mis au jour.

Du 31 juillet au 3 septembre 1996, l’Ifremer envoie à nouveau P-H NARGEOLET et le Nautile sur le site de l’épave. L’objectif de l’expédition est, cette fois-ci, de cartographier, de façon détaillée, l’épave et le site et d’inspecter l’épave afin d’étudier sa corrosion.

En 1996, Paul-Henri NARGEOLET quitte l’Ifremer et intègre, jusqu’en 2003, la société Aqua+, une filiale de Canal+ dont l’objectif est de réaliser des films sous-marins. Il y est chargé des opérations sous-marines effectuées par les 2 sous-marins Jules et Jim. Dans ce cadre, il dirige en 1999 les expéditions sur l’épave du Royal Captain, un navire de la Marine britannique coulé accidentellement en mer de Chine en 1773, ou encore sur l’épave du cuirassé Yamato de la Marine Impériale japonaise, coulé en 1945.

RMS Titanic Inc.

En 2007, il intègre RMS Titanic Inc. en tant que Directeur du programme de recherches sous-marines. Au mois d’août 2010, il est l’un des chefs de mission, avec David GALLO, de la campagne organisée par RMS Titanic Inc. Les objectifs de cette campagne sont de :

cartographier le site de l’épave en 3D grâce aux 2 robots sous-marins autonomes (AUV) Ginger et Mary Ann et au robot téléopéré (ROV) Remora 6000. Ces 3 robots peuvent plonger à 6 000 mètres de profondeur. Ils sont équipés de caméras vidéo et de sonars.
déterminer le processus et la vitesse de détérioration de l’épave. En effet, selon le professeur canadien Roy CULLIMORE (présent lors de cette campagne) des bactéries dévorent l’acier de l’épave laissant présager sa disparition à plus ou moins longue échéance.

P-H NARGEOLET accumule ainsi une expérience et une connaissance importante du site puisqu’il mène au total 6 expéditions : 4 pour l’Ifremer et 2 pour RMS Titanic Inc.

Il réalise 30 plongées (en tant que pilote) sur l’épave du Titanic, supervisant la remontée de près de 5 500 objets, incluant un fragment de la coque pesant 20 tonnes (maintenant exposé à Las Vegas). Il participe à la réalisation de documentaires télévisés : « Deep inside the Titanic » (1999) dans lequel il coordonne la partie images sous-marines ; « The Legend Lives On » (1994) et « Titanic : l’ultime scénario » (2012) ans lequel il joue son propre rôle. Il est également sollicité par le réalisateur canadien James CAMERON, en tant qu’expert de l’épave.

Par ailleurs, en août 2007, il est chargé par RMS Titanic Inc. de localiser l’épave du paquebot SS Carpathia, torpillé en 1918, et qui avait porté secours aux naufragés du Titanic en 1912. Paul-Henri NARGEOLET, en collaboration avec la Comex qui fournit les moyens humains et matériels d’intervention, localise l’épave et récupère, grâce au robot sous-marin (ROV) Super Achille, une centaine d’objets.

Par ailleurs, Paul-Henri NARGEOLET participe à la 3e phase de recherche (du 2 avril au 24 mai 2010) de localisation de l’Airbus A330-203, vol AF 447 (Rio-Paris). Cet avion a disparu le 31 mai 2009 au nord du Brésil avec 228 personnes à son bord. Cette 3e phase de recherche implique le navire américain Anne Candies équipé d’un sonar remorqué ORION et d’un robot sous-marin téléopéré (ROV) CURV 21 et le navire norvégien Seabed Worker équipé de 3 véhicules sous-marins autonomes (AUV) de modèle REMUS 6000 et d’un robot sous-marin téléopéré (ROV) Triton – XLX 4000.

Il décroche La Lune !

Le 15 mai 1993, alors qu’il effectue une plongée d’essais en Méditerranée avec le sous-marin Nautile, P-H NARGEOLET découvre par hasard une épave disparue au large de Toulon au 17e siècle : La Lune, un trois-mâts de la flotte royale de Louis XIV.

Il lui faudra attendre 19 ans avant de plonger de nouveau sur cette épave dans le cadre d’une campagne archéologique exceptionnelle organisée, en 2012, par le Département des Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines (DRASSM) en partenariat avec la Marine nationale, Dassault Systèmes et Arte.

P-H NARGEOLET est alors nommé conseiller technique de l’Opération Lune. Cette mission bénéficie d’équipements exceptionnels : le scaphandre habité Newtsuit de la Marine Nationale ainsi que le Remora 2000 de la Comex équipé d’un prototype de caméra permettant de filmer La Lune en relief.

Elle donne lieu à la diffusion sur Arte du documentaire « Opération Lune : l’épave cachée du Roi-Soleil ».

Les plongées avec Limiting Factor

Paul-Henri NARGEOLET est, depuis novembre 2018, consultant technique de Caladan Oceanic, une entreprise fondée par Victor VESCOVO et dédiée aux technologies sous-marines et au soutien technique d’expéditions dans les grandes profondeurs. Dans ce cadre, il a participé à diverses expéditions comme Five Deeps (2018-2019), dont l’objectif était d’explorer 5 fosses océaniques à bord d’un sous-marin conçu par la société américaine Triton : le Limiting Factor, également connu sous le nom de Triton 36,000/2.

Limiting Factor est le premier et le seul submersible habité au monde à être certifié pour plonger jusqu’à 11 000 mètres de profondeur avec 2 personnes à son bord.

En février 2020, P-H NARGEOLET participe, depuis le navire de surface Pressure Drop, aux deux plongées sur l’épave du sous-marin Minerve qui gît à 2 350 mètres de profondeur au large de Toulon.

De retour sur l’épave du Titanic

P-H NARGEOLET est également présent lors des 5 plongées sur le Titanic en août 2019. Cette mission confirme la détérioration progressive de l’épave, dont l’acier est « mangé » par la bactérie Halomonas titanicae.

Été 2021, 34 ans après sa première plongée avec Nautile, P-H NARGEOLET retourne explorer l’épave du Titanic dans le cadre de la mission « Titanic Survey Expedition – 2021 » organisée par OceanGate.

« Ma dernière plongée sur la proue du Titanic a été l’une des meilleures que j’ai jamais faites. […] j’ai vu des parties de l’épave que je n’avais jamais vues auparavant. »

Un ami de La Cité de la Mer

Paul-Henri NARGEOLET © Baptiste Almodovar, La Cité de la Mer — Paul-Henri NARGEOLET © Baptiste ALMODOVAR, La Cité de la Mer

Dès 2009, P-H NARGEOLET a partagé, à l’occasion de nombreuses soirées grand public organisées par La Cité de la Mer, sa passion pour le Titanic et pour l’exploration sous-marine en général. La Cité de la Mer a également bénéficié de son expertise dans le cadre d’expositions permanentes et temporaires consacrées au Titanic.

En 2017, Paul-Henri NARGEOLET a rejoint, aux côtés de Pierre WILLM ou Anatoly SAGALEVICH, le « Wall of Fame » des Explorateurs des Abysses visible dans la Nef d’Accueil de La Cité de la Mer.

Membre de la société américaine de géographie Le Club des Explorateurs (The Explorers Club), Paul-Henri NARGEOLET a été nommé, en France, Chevalier de l’Ordre du Mérite maritime et de l’Ordre National du Mérite.

Paul-Henri NARGEOLET disparaît accidentellement en juin 2023, lors d’une plongée sur l’épave du Titanic.