Il y a maintenant 40 ans, le 3 avril 1985, le sous-marin Nautile plongeait pour la première fois sous la surface de l’eau, à la découverte des mystères de l’Océan.

Opérée par l’Ifremer – anciennement CNEXO – et sa filiale d’armement Genavir, Nautile est le seul sous-marin habité de la flotte océanographique française. Il est mis en service en 1984 et, grâce à capacité de plongée à 6 000 m de profondeur maximale, il peut accéder à 97% des fonds océaniques. Il est le seul sous-marin scientifique habité en Europe capable d’atteindre les grands fonds.

C’est dans cette optique que l’engin de 19 tonnes réalise sa première mission scientifique, baptisée « Kaïko », en 1985. Il observe et cartographie la géologie des grandes fosses japonaises jusqu’à 6 000 mètres de profondeur, là où seuls les bathyscaphes s’étaient aventurés avant lui.

En plongeant également sur des sources hydrothermales, Nautile a contribué à la découverte de nouvelles formes de vie à de grandes profondeurs.

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Campagne KAÏKO (leg 2) - Faune des grands fonds
© Ifremer (1985). Campagne KAÏKO (leg 2) - Faune des grands fonds. Ifremer. https://image.ifremer.fr/data/00796/90815/

C’est lors de cette mission, le 13 août 1985, que l’explorateur Guy SCIARRONE – responsable technique du Nautile et chef pilote jusqu’en 1995 – effectue sa plongée record de 6 000 mètres de profondeur. Il raconte :

Une nasse avec des déchets de viande a été envoyée sur le fond. Le but était d’attirer le maximum d’espèces des grands fonds, mais au cours de cette plongée la seule espèce que nous avons vue était un spécimen de requin dormeur. Nous étions très satisfaits de voir enfin cette espèce de requin qui n’est pas obligé d’évoluer pour avoir un échange d’oxygène avec ses branchies, contrairement aux autres requins communs.

Toujours en activité aujourd’hui, Nautile a effectué plus de 2 100 plongées et participé à de nombreuses explorations scientifiques, parmi lesquelles, l’étude de l’épave du plus célèbre paquebot, le Titanic. Cette aventure « titanesque » démarre deux ans après « Kaïko », en 1987.

Surnommé « l’Insubmersible », le Titanic de la White Star Line a sombré dans la nuit du 14 au 15 avril 1912 par 3 800 mètres de fond, à la suite d’une collision avec un iceberg au Sud de Terre-Neuve. L’épave est localisée le 1er septembre 1985, grâce aux efforts conjugués des scientifiques français et américains.

En juillet 1987, c’est la première campagne de récupération d’objets sur le champ de débris autour de l’épave. Ifremer met Nautile à contribution à des fins de recherche et de reconnaissance.

Nautile est préféré à Alvin – le sous-marin de la flotte américaine ayant effectué la toute première plongée habitée sur l’épave en 1985 – car ses capacités de prélèvement ont été jugées meilleures.

En se déplaçant avec ce sous-marin, la vision de l’ensemble d’un site est plus complète et réaliste que derrière un écran. Pour une exploration, certains scientifiques privilégient de plonger à bord du Nautile afin de littéralement s’immerger dans l’environnement profond.

Viorel CIAUSU, Ingénieur en charge du Nautile, unité Systèmes sous-marins à l’Ifremer
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© Dugornay Olivier (2014). Nautile - Contrôle du sous-marin en semi-immersion. Ifremer. https://image.ifremer.fr/data/00378/48947/
L'histoire du Nautile

Nautile effectuera 32 plongées, totalisant plus de 156 heures sur le fond, permettant ainsi la réalisation de 12 000 photos, de milliers de mètres de bandes vidéo et la collecte de 1 892 objets dans le champ de débris autour de l’épave.

Lors de sa première plongée sur l’épave du Titanic, le 24 juillet 1987, Nautile est piloté par Guy SCIARRONE, accompagné par Max DUBOIS à la navigation et Paul-Henri NARGEOLET comme passager. La plongée dure pas moins de 9 heures.

Parmi les autres célèbres explorateurs qui ont plongés sur l’épave du Titanic avec Nautile : Jean JARRY – responsable du service Intervention sous-marine au siège du CNEXO à partir de 1982 – et Pierre-Yves LE BIGOT – pilote, hydraulicien plongeur et spécialiste des technologies appliquées aux milieux sous-marins.

Ce dernier lors d’une plongée en tant que co-pilote en 1987, aide notamment à remonter l’emblématique Angelot, statuette en bronze du Grand Escalier de 1re classe du paquebot.

En 1985, Jean JARRY est l’un des scientifiques qui organise la campagne franco-américaine d’essais des sonars SAR et ARGO, au cours de laquelle est découverte l’épave du Titanic. Il plongera par la suite sur l’épave avec Nautile.

C’est un merveilleux engin qui a bénéficié tant des progrès technologiques réalisés dans les années 80, que de l’expérience technique et opérationnelle des équipes de la Marine et du CNEXO, devenu Ifremer.

Jean JARRY

Avec la promesse de grandes aventures dans les fonds marins, Nautile n’est pas près de prendre sa retraite. Sa mission, qui devait s’achever en 2025, est finalement prolongée jusqu’en 2035.

Vous pouvez consulter en ligne, gratuitement, le calendrier annuel des campagnes de la Flotte océanographique française.

Archive : la conception du Nautile

Ces images sont des archives de la construction de la sphère habitable à l’intérieur du Nautile, le sous-marin scientifique français. Cette sphère est composée d’un alliage de titane porté à 1170°C et modelée dans une presse hydraulique. Il s’agissait d’une première, puisqu’aucune tôle en alliage de titane de plus de 25 mm d’épaisseur n’avait été laminée en France, ce qui fait du Nautile un des fleurons de la Flotte océanographique française opérée par l’Ifremer et sa filiale d’armement Genavir.

Article signé Julie HENRY POUTREL, documentaliste de la Médiathèque de La Cité de la Mer.