Monstres marins : Mythes et légendes

III. c. Le calmar géant

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Pendant longtemps, le calmar géant ou Architeuthis (nom latin) n’exista que dans l’imaginaire des hommes. Il a fallu attendre le 19ème siècle pour que les scientifiques aient enfin la preuve de l’existence de ces incroyables céphalopodes* vivant en pleine eau.

Le calmar est associé à des attaques de navires et de marins. Certains auteurs pensent d’ailleurs que le Kraken pourrait être un calmar.

Le calmar détenant le record officiel de longueur est celui qui s’échoua le 2 novembre 1878 à Thimble Tickle, sur la côte septentrionale de Terre-Neuve. Il mesurait près de 17 mètres ! Il semblerait pourtant qu’il en existe des spécimens beaucoup plus grands. Ainsi, la découverte de tentacules isolés de calmars d’une étonnante longueur tend à conforter cette hypothèse : l’un d’eux mesurait en effet 14 mètres ! Autre argument : les empreintes de ventouses laissées par le calmar sur la peau du cachalot. Celui-ci est en effet friand de la chair des calmars. Ces empreintes permettent de donner une idée approximative de la taille des calmars géants, à savoir 22 mètres, voire plus…

Dans la littérature populaire consacrée aux mollusques, voire dans certains ouvrages scientifiques, poulpes et calmars ont souvent été confondus.

C’est Victor Hugo qui parla le premier de « pieuvre » (nom que les pêcheurs normands donnaient au poulpe) dans « Les travailleurs de la mer » jetant ainsi le trouble dans les esprits : si l’on considérait les pieuvres comme des poulpes pourquoi les calmars ne pouvaient-ils l’être également ? En effet, poulpe (polype) signifiait « à nombreux pieds » et le calmar en possédait plus que la pieuvre. Par la suite, les écrivains et les marins ont confondu pendant longtemps les poulpes, pieuvres, calmars ou seiches. Par exemple : les mots « poulpe » et « encornet » (ou calmar) désignaient le même céphalopode*.


Quelle est la différence entre un poulpe et un calmar ?

Le poulpe possède un corps plus ou moins sphérique. Il a un bec corné. Il possède huit bras pourvus chacun de deux rangées de ventouses. Pour chasser, il se fixe sur le fond à l’abri dans un trou ou derrière des pierres.

Le calmar possède un corps allongé et cylindrique, pourvu d’une paire de nageoires latérales. Il possède dix bras dont deux plus longs que les autres. Il a un bec corné. Il poursuit ses proies et les capture avec ses deux longs tentacules.


Déjà au Ier siècle de notre ère, Pline l’Ancien évoquait l’échouage de grands calmars près de Gibraltar. Quatorze siècles plus tard, le médecin et naturaliste* allemand Joannes de Cuba signala que, dans la mer océane de Mauritanie, les calmars étaient si nombreux qu’ils pouvaient noyer les bateaux. Quelques décennies plus tard, Olaüs Magnus parle de monstres « horribles de forme » vivant dans les mers de Norvège et capables de couler de grands navires. Il les décrit avec une tête carrée, épineuse et aiguë, entourée de grandes cornes ressemblant à des racines d’arbres. Au cours du 17ème siècle, cinq échouages d’encornets ou de seiches plus ou moins gigantesques sont enregistrés sur diverses côtes européennes (Islande, Hollande, Allemagne, Irlande et Norvège), toutefois il faudra attendre le 19ème siècle pour que les scientifiques aient enfin la preuve de l’existence de ces céphalopodes*.

Le 17 novembre 1861, le navire militaire Alecton croisait au large de Tenerife lorsqu’il se trouva devant un calmar géant flottant à la surface de l’eau. La bête était encore vivante et le bateau la poursuivit pendant trois heures avant de pouvoir la harponner. Les marins en voulant la hisser à bord, la sectionnèrent, la laissant ainsi s’échapper. Après ce mémorable incident qui déchaîna les passions, on n’entendit plus beaucoup parler du calmar géant.

Entre 1871 et 1881, une succession inexplicable d’échouages ou d’observations à la surface de la mer fut enregistrée sur la côte de Terre-Neuve et dans les eaux voisines. Des dizaines de spécimens furent découverts à l’agonie ou morts. De nombreux articles et études sur ce sujet furent publiés et le scepticisme des zoologues s’atténua. D’autres échouages ou captures furent ensuite signalés régulièrement jusqu’en 1900 au Japon, dans l’océan Indien, en Norvège, en Irlande et surtout en Nouvelle-Zélande.

Aujourd’hui les observations d’Architeuthis ne sont plus rares. Plusieurs spécimens blessés ou échoués ont été retrouvés, mais aucun n’avait été observé vivant, en pleine action. C’est chose faite ! En effet, à l’automne 2004, des scientifiques japonais ont réussi à photographier un calmar de 8 mètres de long dans l’océan Pacifique Nord, près des îles Chichijima.  Après avoir pisté un groupe de cachalots, grands amateurs de calmars géants, l’équipe nippone a utilisé un appât plongé à 900 mètres de profondeur attirant ainsi un calmar.

Avec une caméra et une source lumineuse installées sur la corde, les chercheurs japonais ont pris des images inédites de l’attaque du calmar géant. Attaque qui a duré 4 heures, avant que le calmar ne finisse par abandonner sa proie et un morceau de tentacule de plus de 5 mètres de long !

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