Il semble que la sirène à queue de poisson soit apparue dans la littérature vers le 8e siècle. Elle est représentée, tantôt comme une très jolie femme, dotée d’une belle poitrine, de cheveux toujours longs et ondulés, variant du blond au vert en passant par le roux flamboyant, tantôt comme un monstre hideux. Dans ce cas, la queue de poisson symbolisait une sorte de serpent et faisait d’elle un véritable démon femelle, symbole de la luxure* (représentée par le miroir et le peigne qui évoquent les prostitués).
Argument repris par l’Eglise chrétienne : la sirène représente l’amour charnel. L’élément dans lequel elle évolue, la mer, est un espace inconnu, insondable, constituant le domaine du diable. Femme-oiseau et femme-poisson coexistent au Moyen Âge* et ont les mêmes fonctions : elles attirent les marins par leur beauté, les envoûtent par leurs chants mélodieux, les endorment puis les tuent et les dévorent.
Une mort certaine attend donc les navigateurs (noyade ; erreurs de navigation du marin en raison de sa baisse de vigilance ce qui peut être fatal en mer…). La vue d’une sirène par un marin, qu’il soit en mer ou à terre, est d’ailleurs un présage de malheur : tempête, mauvaise pêche, mort…
Puis progressivement, la femme-oiseau laisse la place à la femme-poisson : à partir des années 1500, elle disparaît définitivement. Il est d’ailleurs intéressant de préciser que les européens du nord, les asiatiques… avaient déjà intégré les femmes-poissons dans leurs traditions orales ou écrites.
L’image associant la sirène à une séductrice maléfique va s’estomper avec la publication, en 1836, par Hans Christian Andersen de « La Petite Sirène ». Celle-ci voulant vivre parmi les humains, échange sa voix contre deux jolies jambes. Mais elle ne parvient pas à séduire celui qu’elle aime et, tandis qu’il en épouse une autre, elle disparaît dans la mer avant de se transformer en fille des airs.
Selon Aliette Geistdoerfer, anthropologue, les sirènes « représentent les épreuves que doivent passer les terriens pour devenir marins. […] Le marin en mer qui aperçoit une sirène est attiré par cette femme nue […] S’il se laisse aller à ses charmes, il mourra, non pas en termes physiques, mais parce qu’il restera en mer et ne reviendra pas à terre. Le terrien laissera la place au marin […]. Mais s’il rejette cette écoute […], il s’expose également à une certaine forme de mort […], il se détourne de la mer et reviendra à terre. Le marin doit (donc) écouter la sirène, elle lui apprendra à connaître et à apprécier la mer mais il ne doit pas se donner à elle ».
Les naturalistes* ont émis plusieurs hypothèses quant à la nature de la sirène. Elle serait, pour les uns, un lamantin (mammifère herbivore dont la poitrine chez les femelles porte deux seins apparents), pour les autres, une espèce de phoque ou une raie manta. Celle-ci possède en effet deux diverticules* sous le ventre pouvant atteindre un mètre de long et ainsi être assimilés aux bras d’une femme-poisson !
Les Néréides
Elles englobent les 50 filles issues de l’union entre Nérée et Doris. Avant elles, 300 nymphes* de l’eau naquirent de l’amour incestueux entre le dieu Océan et sa sœur Thethys : ce sont les Océanides (parmi elles, Euromyne représentée comme une sirène et Doris qui deviendra la femme de Nérée).
Les Néréides, « filles des vagues », forment une variété de sirènes vivant exclusivement dans la mer Méditerranée et la mer Egée. Chevauchant des monstres marins, elles symbolisent le mouvement de la mer.
Elles sont représentées comme des nymphes* très belles, portant souvent des perles dans leur longue chevelure. Elles vivent au fond de la mer dans le palais de leur père, Nérée, et passent leur temps à filer, tisser, chanter et s’amuser dans les vagues. Contrairement aux sirènes, les Néréides protègent les marins, et n’utilisent leur merveilleuse voix que pour contenter leur père et non pour attirer les navires contre les récifs. Une seule fois, elles firent preuve de cruauté : Cassiopé, reine légendaire d’Éthiopie, ayant prétendu qu’elle était plus belle que les Néréides, celles-ci protestèrent auprès de Poséidon qui envoya un monstre marin ravager le pays.
Le « monstre marin en habit d’évêque »
Le « monstre marin en habit d’évêque » est l’un des personnages fabuleux représenté dans un ouvrage de Guillaume Rondelet au 16e siècle.