Mariana ASSAF
Vendeuse de fruits et légumes, 3e classe
Syrienne | 45 ans | Embarquement à Cherbourg | 3e classe | Rescapée |
Mariana ASSAF est née en 1867 à Kafar (Kfar) Mishki en Syrie (actuellement au Liban). Elle émigre à Ottawa (Canada) vers 1906/1907 et se lance, avec succès, dans la vente de fruits et légumes. Elle a pour principale clientèle la classe aisée de la ville. Début 1912, elle a économisé assez d’argent pour retourner en Syrie voir ses 2 fils, Ascad et Hanna.
Au mois d’avril, il est temps pour elle de rentrer au Canada. Ses 2 fils sont déçus lorsqu’ils apprennent que leur mère ne les emmène pas avec eux. Ils la rejoindront plus tard.
Après avoir rejoint le port de Beyrouth (à environ 80km de son village), Mariana ASSAF embarque pour Marseille.
Elle est accompagnée de son cousin Assaf GERIOS THAMAH et du fils de son neveu, Solomon KHALIL. D’autres membres de sa famille et de son village sont également présents dont 3 de ses cousines probablement Catherine David BARBARA, sa fille Saiide BARBARA et Maria Elias CARAM.
Le 10 avril 1912, à Cherbourg, elle embarque à bord du Titanic en 3e classe avec le ticket n°2696. Le soir du 14 avril 1912, Mariana ASSAF est couchée. Quand le navire heurte l’iceberg, elle ressent une secousse et se lève pour voir ce qui se passe.
« On nous assura que tout allait bien et nous pensions donc qu’il n’y avait pas de danger. Mais puisque le navire n’avançait plus, quelques-uns parmi nous commencèrent à croire qu’ils ne nous racontaient pas la vérité et que peut-être étions-nous en train de couler. Je pense que quelqu’un dut dire que le bateau allait sombrer, car soudain il y eut une grande agitation et tout le monde se rua vers le pont. »
Dans l’entretien que Mariana ASSAF accorde au journal canadien Ottawa Citizen le 24 avril 1912, elle raconte :
« Une foule de gens de troisième classe tenta de prendre d’assaut les canots et quelques officiers répliquèrent avec des tirs de revolver. Certains furent tués, le reste fut repoussé. On ne leur laissa aucune chance de fuite. »
Il est prouvé que certains coups de feu ont été tirés. Ainsi, le 5e officier Harold GODFREY LOWE a déclaré, devant la commission d’enquête américaine, avoir tiré 3 coups de feu afin d’empêcher des émigrants de sauter dans le canot n°14 dont il avait le commandement. Il craignait qu’ils ne fassent chavirer l’embarcation.
Mariana ASSAF parvient à s’échapper de la cohue et se précipite sur le pont supérieur réservé aux passagers de 1re classe. Un homme, peut-être un marin, la pousse alors dans le canot de sauvetage C.
« Le canot fut mis à l’eau et ensuite les hommes ramèrent pour l’éloigner, car ils craignaient qu’en s’abîmant dans l’océan, le grand bateau ne nous entraîne avec lui. Certains disent que l’orchestre était en train de jouer, mais je ne l’entendis pas. J’avais tellement perdu l’esprit […] puis, le Titanic coula et nous errâmes toute la nuit. Il faisait affreusement froid et je pensais constamment à tous les parents et à tous les amis que je ne reverrais plus jamais. Chaque fois que je pensais à eux, je sentais que j’allais devenir folle. »
À bord du Carpathia, on lui donne des vêtements secs. Elle est blessée aux jambes et est anéantie lorsqu’elle réalise que tous ses proches sont morts dans le naufrage.
À New York, la United Syrian Club la prend en charge et lui finance probablement le trajet jusqu’à Ottawa. Elle arrive le 23 avril 1912 à bord du Grand Trunk Train. Elle y retrouve George KHALIL, la mère de Solomon.
À Ottawa, elle rouvre son commerce. Elle rentrera définitivement, quelques années plus tard, au Liban. Elle s’éteint dans les années 1950.
Une grande confusion règne dans la transcription des noms des immigrés syriens et libanais sur les listes de passagers. Les informations sur la vie personnelle (situation maritale, nombre d’enfants…) de ces passagers sont d’ailleurs souvent erronées.