« Je suis Tim Shank, scientifique ici au Woods Hole Oceanographic Institution et je travaille comme biologiste spécialisé dans les écosystèmes profonds.
Avant la découverte de sources hydrothermales aux îles Galápagos, on croyait que des organismes ne pouvaient pas exister sans soleil et que les animaux des profondeurs océaniques se nourrissaient exclusivement de débris organiques tombés au fond. Mais les sources ont tout changé ! Que des sels nutritifs surgissaient de l’intérieur de la Terre que les animaux pouvaient manger et que ses organismes n’avaient pas besoin de soleil pour vivre c’était du jamais vu !
Les 1ères sources ont été découvertes aux îles Galápagos en 1977 par une équipe de géologues, mais les biologistes n’ont pu les étudier qu’en 1979.
Ils ne s’attendaient pas à trouver ces animaux ; ils cherchaient plutôt des sources de chaleur sortant de la croûte terrestre. Mais ils ont découvert des formes de vie vues nulle part ailleurs, comme des vers tubicoles d’environ 3 mètres sans bouche, ni yeux ni intestins. Ils semblaient avoir une poche de bactéries utilisée pour se nourrir – ces bactéries transforment les parties chimiques des fluides en énergie pour le ver tubicole. Et ils ont aussi récolté un grand volume d’informations sur les stratégies d’adaptation et d’évolution de ces espèces.
Une fois que les sources ont été trouvées aux Galápagos en 1977, la découverte d’autres sites a suivi rapidement : un peu au nord en 1979, puis dans le Golfe de Californie en 1981 ; sur la côte des Etats d’Oregon et de Washington en 1984. En 1985, les premières sources étaient découvertes dans l’Océan Atlantique. Cela faisait beaucoup de nouveaux sites en peu de temps, ce qui nous surprend toujours !
Et si je vous dis que nous connaissons désormais dans le monde 600 espèces qui vivent à proximité des sources hydrothermales ! Cela fait une nouvelle espèce presque tous les dix jours depuis trente ans. C’est super !
Le long de la dorsale « Pacifique Est » sur la côte de l’Amérique du sud au-dessus des Galápagos, vivent plutôt des vers tubicoles, des grandes palourdes et des moules. Au nord sur la côte des Etats d’Oregon et de Washington, on peut voir d’autres sortes de palourdes et de vers, mais ce sont des espèces légèrement différentes de celles qui existent au sud.
Un des endroits « clés » à étudier était donc l’Océan Arctique. C’est un lieu fascinant pour étudier l’évolution de la vie sur notre planète! C’est un bassin pratiquement fermé ; de l’eau peut rentrer et sortir à un niveau peu profond à partir du détroit de Fram côté Atlantique et par la mer de Béring côté Pacifique mais il y a très peu de connexions en profondeur dans cette mer.
Ce bassin est resté isolé depuis environ 28 millionsd’années, tout ce qui a évolué dans les eaux autour de la dorsale Gakkel, n’a donc pas eu donc de contacts extérieurs pendant tout ce temps.
A quoi ces animaux vont-ils ressembler ? Je n’en ai pas la moindre idée ! Mais je peux vous dire que si nous en trouvons là-bas, ils auront des adaptations intéressantes, des choses que nous n’avons encore jamais vues. Ils vivent peut-être de ressources et de sels nutritifs que nous ne connaissons pas.
C’est donc un rêve pour un biologiste de pouvoir y aller et de trouver ces animaux ! »