« J’occupe le poste d’ingénieur en chef pour ce projet. Cette mission est menée par un certain nombre de scientifiques : des géologues, des biologistes et des chimistes, mais en tant qu’ingénieur principal, je suis responsable de la conception des robots autonomes (AUV) et des longueurs de câble que l’on utilisera lors de cette expédition.
Notre objectif pour cette mission, ce n’est pas de sortir avec 4 engins différents : la sonde CTD, le robot Camper et 2 robots autonomes (AUV) nommés Jaguar et Puma mais de les utiliser ensemble afin d’en savoir plus sur les sources hydrothermales dans l’Océan Arctique.
Il faut souvent des mois pour trouver une source et les expéditions précédentes, qui avaient les mêmes indices que nous, n’ont pas trouvé de sources. Ils étaient équipés d’un véhicule télécommandé (ROV) et d’un robot autonome (AUV). C’est déjà difficile en pleine mer, alors c’est encore plus dur sous la glace de l’océan Arctique !
Travailler dans l’Océan Arctique est très différent d’un travail en pleine mer. Une des différences principales c’est qu’en pleine mer, nous avons un type de robot sous-marin que l’on règle avec un équilibre positif pour qu’il s’éteigne automatiquement en cas de problème et remonte doucement à la surface ensuite. Dans l’Arctique par contre, il sera peut-être impossible de récupérer l’engin sous la glace.
Nous avons une expression entre nous : on dit que c’est une bonne journée lorsque le nombre de récupérations est égal au nombre de déploiements !
Le véhicule le plus important mais le plus « basique » est la sonde CTD. Cet instrument est couramment utilisé durant les campagnes océanographiques. CTD veut dire « Conductivity Temperature Depth ». La première chose à faire en arrivant sur place c’est de mettre cet instrument à l’eau pour qu’il nous confirme la présence d’une cheminée et qu’il nous donne une indication de sa position.
Lorsque c’est fait alors nous mettons à l’eau les robots autonomes : Jaguar et Puma. Ce sont des robots qui sont préprogrammés à bord du navire. Ils sont ensuite lancés sans connexion et sans être reliés au navire par un câble. On communique acoustiquement avec eux pendant leur mission mais ce sont des engins autonomes.
Nous avons deux véhicules de ce genre sur le navire. D’abord Puma, qui veut dire « Plume Mapper ». C’est un véhicule conçu pour repérer les sources hydrothermales. Ses capteurs sont principalement associés à des recherches chimiques et de températures qui lui permettent d’identifier la source et de la localiser. Ensuite, on peut mettre Jaguar (« Just Another Grand Underwater Autonomous Research ») à l’eau. Ce robot est conçu pour cartographier une zone : il prend des photos et fait des cartes sonores de l’endroit identifié par Puma.
Une fois que ces deux engins ont identifié un site et l’ont cartographié, nous utilisons notre troisième véhicule qui est un engin tracté : Camper (« Camera Sampling »). Il est équipé d’une caméra pour filmer les organismes qui vivent autour de la source et de « préleveurs » pour retirer des échantillons biologiques et géologiques au niveau de la source hydrothermale.
Nous pouvons échouer car il y a beaucoup de risques : perdre nos véhicules, ne pas récupérer assez de données etc. mais je crois que nous avons aussi de forte chance de réussir ! Quand on a comparé les risques avec le résultat possible, on a trouvé que c’était un projet qui valait le coup et c’est pour cela que nous tentons notre chance ! »