Bactéries des Abysses

II. b. Les différentes techniques de prélèvements

dt_bacter_0032

Pour étudier les sites hydrothermaux sous-marins profonds, il est nécessaire de posséder des submersibles scientifiques, capables de résister aux pressions énormes des profondeurs abyssales, et équipés d’un matériel sophistiqué permettant l’observation et le recueil des informations.

Or, dans le monde, seuls les Etats-Unis, la Russie, le Japon et la France possèdent aujourd’hui de tels engins. La France en avait même deux mais l’un d’entre eux, Cyana (Ifremer) a été désarmé en 2003. Reste donc le Nautile (Ifremer), submersible habité, qui peut plonger jusqu’à 6000 mètres de profondeur.                                                                                                                                    

Ces submersibles ont permis l’isolement de nombreuses archéobactéries hyperthermophiles telles que Pyrodictium abyssi, Pyrococcus abyssi et Pyrococcus furiosus, Methanococcus jannashii ou Archaeoglobus profondus.

dt_bacter_0034

L’Ifremer a également conçu Victor 6000 : le premier système téléopéré français de type ROV (Remotely Operated Vehicle). Un robot qui peut descendre jusqu’à 6000 mètres de profondeur.

A la différence des sous-marins habités qui ne peuvent demeurer que quelques heures au fond en raison des problèmes d’autonomie d’énergie pour le véhicule et d’oxygène pour l’équipage, Victor 6000 est, lui, capable d’opérer plusieurs jours sur le fond et de transmettre des flux de données importants vers son navire de surface, grâce à la fibre optique.

Pour en savoir plus : http://www.ifremer.fr/flotte/systemes_sm/index.html


En savoir + : une plongée à bord du Nautile

Le Nautile est un sous-marin qui peut atteindre une profondeur de 6000 mètres. A son bord, dans une sphère de 2 mètres de diamètre : un pilote, un co-pilote et un observateur scientifique. Pour effectuer un maximum de prélèvements, des engins d’échantillonnages sont immergés avant la plongée du submersible. Ils arriveront sur le fond à proximité de la cible de plongée.

Le Nautile est ensuite mis à l’eau à partir d’un navire océanographique, qui embarque outre son équipage, l’équipe technique du Nautile et une équipe scientifique de 12 à 20 personnes. Selon le programme de la mission, la campagne peut durer de 15 à 30 jours avec en général une plongée par jour.

La cible à atteindre est circonscrite dans un périmètre délimité par des balises acoustiques, dans lequel se déplace le sous-marin.

A chaque plongée, les deux pilotes et l’observateur scientifique disposent d’un programme de mesures et d’échantillonnages à effectuer pendant les 5 heures passées au fond. Après environ 1 heure de descente, la proximité du site est indiquée par la densité des particules et l’apparition d’une faune spécifique qui confirme les consignes de navigation transmises depuis la surface et qui permettent l’approche finale.

L’exploration d’un site commence par :

  • La mesure des températures des différentes émissions de fluides hydrothermaux.
  • Le prélèvement de ces fluides à l’aide de seringues en titane ou de bouteilles. Leur analyse donnera des indications sur l’environnement physico-chimique des microorganismes vivant à leur contact.
  • La pose de collecteurs sur une cheminée active. Ils y resteront pendant plusieurs jours. Ils contiennent des coupons de diverses natures sur lesquels vont se fixer les particules et les cellules entraînées par le fluide hydrothermal provenant de la cheminée.
  • Le prélèvement de morceaux de cheminées pour connaître la composition et la localisation des communautés de microorganismes qui sont répartis, selon un gradient de température, sur les parois des cheminées hydrothermales.

Guidé par le scientifique, le pilote commande les deux bras télémanipulateurs pour prélever les échantillons au milieu des rochers et des sédiments. Echantillons qui sont ensuite rangés dans un panier étanche. Le copilote, lui, actionne les caméras photos et vidéo.

Certaines précautions doivent être respectées tout au long du prélèvement afin d’éviter la contamination par l’oxygène qui est toxique, à haute température, pour la plupart de ces microorganismes. A cause de la faible solubilité de l’oxygène à haute température et de la présence de gaz réducteurs, la plupart des environnements chauds arborent des microorganismes anaérobies*. Malgré tout, même les hyperthermophiles peuvent survivre pendant des années dans les laboratoires en présence d’oxygène, s’ils sont maintenus au froid.

Une fois le sous-marin remonté, chacun procède soit directement à l’analyse des échantillons dans les laboratoires embarqués, soit à leur conditionnement en vue de les étudier sur la terre ferme.

Les échantillons collectés par les submersibles sont placés dans des enceintes isothermes avant d’être remontés à la surface. Les enceintes seront ensuite transférées dans des flacons contenant de l’eau de mer stérile et un réducteur (par exemple le sulfure de sodium) pour maintenir l’anaérobiose*. Ils sont conservés ainsi jusqu’à leur arrivée dans les différentes structures (Ifremer,…) où ils seront traités.