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Masahiko IDA © JAMSTEC (2)
Masahiko IDA © JAMSTEC

Masahiko IDA

Un plongeur SEATOPIA

Masahiko IDA intègre l’Institut océanographique japonais JAMSTEC (Japan Agency for Marine-Earth Science and Technology) en 1974. Jusqu’en 1980, il participe, en tant que plongeur, au programme d’habitat sous-marin et de plongée en saturation SEATOPIA (« sea » pour « mer » et « utopia » pour « utopie ») initié par le Japon en 1971. L’objectif final du programme SEATOPIA est de faire vivre 4 hommes à 100 mètres de profondeur durant 1 mois.

SEATOPIA se compose d’un habitat sous-marin relié à une barge en surface équipée de 3 caissons de décompression et de 2 tourelles chargées de transférer les océanautes dans la maison sous-marine. L’habitat sous-marin mesure 10,85 mètres de longueur, 4,5 mètres de largeur et 6,52 mètres de hauteur, le tout pesant 68 tonnes. SEATOPIA se situe au large des côtes de Tago (région de Shizuoka).

Le programme SEATOPIA permet également de tester la plongée en saturation. En effet, à l’époque, l’utilisation des scaphandres autonomes ne permet pas à l’Homme de dépasser la limite des 60 mètres de profondeur. Une contrainte physiologique le lui interdit : l’ivresse des profondeurs. Pour pallier ce problème, une nouvelle étape est franchie par respiration de mélanges gazeux spécifiques à base d’hélium.

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La maison sous-marine SEATOPIA © JAMSTEC
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La maison sous-marine SEATOPIA se situe au large des côtes de Tago (région de Shizuoka) © JAMSTEC

L’Homme peut donc intervenir plus profond. Mais comment y rester plus longtemps sans être limité par la quantité de mélange respiratoire disponible dans la bouteille, par la température de l’eau et surtout par les longues périodes de décompression imposées à chaque remontée ?

Au début des années 1960, 2 voies s’ouvrent alors, aux antipodes l’une de l’autre :

  • Les maisons sous la mer développées aux États-Unis (« Sealab ») et en France (« Précontinent »). L’Homme peut vivre pendant plusieurs jours en saturation : il est maintenu pendant toute la durée de son séjour à l’intérieur d’un habitacle pressurisé aux conditions de pression de la profondeur à laquelle il doit plonger. Il peut ainsi sortir de son habitat et y entrer en ne subissant qu’une seule phase de décompression à la fin de son séjour.
  • La seconde voie est la plongée en saturation dans un habitat hyperbare de surface, développée, entre autres, par l’entreprise française Comex.
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Un plongeur sort de la tourelle pour rejoindre la maison sous-marine SEATOPIA © JAMSTEC

Toute l’astuce revient à mettre les plongeurs en saturation au sec et au chaud, à la pression de travail, dans un caisson embarqué sur le pont d’un bateau ou d’une barge. L’aller et le retour sur le lieu d’intervention s’effectuent dans une tourelle de plongée. Cette technologie, moins coûteuse, s’adapte particulièrement aux contraintes de l’industrialisation de la plongée profonde (très utilisée à partir des années 1970). La durée de compression des plongeurs est courte en comparaison du temps de décompression. Par exemple, pour une plongée à 300 mètres, les plongeurs doivent subir une compression de 14h et une décompression de 10 jours.

Le personnel travaillant sur la barge est chargée de contrôler et de répondre aux besoins des océanautes (électricité, nourriture…). Un câble reliant la barge à la maison sous-marine permet de fournir, entre autres, aux océanautes les mélanges respiratoires nécessaires (héliox : mélange d’hélium et d’oxygène).

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Plongeur évoluant aux abords de la maison sous-marine SEATOPIA © JAMSTEC

SEATOPIA se décline en plusieurs étapes :

  • En 1972 : 4 japonais passent 2 jours à 30 mètres de profondeur.
  • En 1973 : 4 hommes séjournent 1 semaine à bord de Seatopia à 60 mètres de profondeur.
  • En 1975 : expérimentation à 100 mètres de profondeur.

À bord du premier sous-marin habité japonais Shinkai 2000

En 1980, Masahiko IDA est nommé pilote en chef du sous-marin Shinkai 2000, le premier sous-marin d’exploration habité japonais, alors en construction. Lancé en 1981, ce sous-marin capable de plonger jusqu’à 2 000 mètres de profondeur a réalisé de nombreuses missions scientifiques, essentiellement autour du Japon :

  • découverte de sources hydrothermales ;
  • étude de la faune des grands fonds ;
  • recherche dans le domaine de la géologie (tremblements de terre…)
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Shinkai 2000 © JAMSTEC
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Fumeur noir se développant sur le site hydrothermal baptisé Beebe (du nom d’un des concepteurs de la bathysphère) : la température des fluides hydrothermaux y avoisine les 400°C. © JAMSTEC

À bord du Shinkai 2000, deux pilotes et un chercheur sont installés dans une sphère de 2,2 mètres de diamètre. Trois hublots sont à leur disposition pour des plongées qui peuvent durer jusqu’à 7 heures.

Le Shinkai 2000 est retiré du service en 2004 après 1 411 plongées, il laisse la place au Shinkai 6500 lancé en 1990 qui bénéficie des technologies et des expériences accumulées par son prédécesseur.

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Ecorché du Shinkai 2000 avec sa sphère de 2,2 mètres de diamètre © JAMSTEC
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Mise à l’eau du Shinkai 6500 © JAMSTEC

Commandant du Shinkai 6500

Masahiko IDA a, lui, rejoint les équipes du Shinkai 6500, dès 1989, en tant que Commandant en second. Il est nommé Commandant du Shinkai 6500 en 1993. Capable d’atteindre 6 500 mètres de profondeur, le Shinkai 6500 permet aux scientifiques :

  • d’étudier les phénomènes géologiques à l’origine des mouvements internes de la Terre comme les zones de subduction (zone où une plaque océanique plonge sous une autre plaque) où se produisent les tremblements de terre ;
  • de comprendre l’origine de la vie et son évolution au travers d’écosystèmes extrêmes comme les sources hydrothermales et leur faune exubérante capable de résister à des conditions de vie hostiles ;
  • d’appréhender la diversité des organismes qui vivent dans les grandes profondeurs océaniques et d’étudier leur potentialité (santé, alimentation…).
  • de comprendre le fonctionnement des systèmes hydrothermaux et leur rôle dans les changements environnementaux mondiaux actuels.
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© JAMSTEC

Le Shinkai 6500 peut accueillir 3 personnes : 2 pilotes et 1 chercheur dans une sphère de 2 mètres de diamètre durant une plongée « normale » de 8 heures. Le 13 octobre 1990, Masahiko IDA atteint la profondeur record de 6 500 mètres à bord du Shinkai 6500 au large du Japon dans l’océan Pacifique.

Du Chikyu au MARITEC

Entre 1999 et 2007, Masahiko IDA contribue à différents projets et missions organisés par le JAMSTEC. Il participe notamment à la conception, dès 2001, du navire de forage Chikyu (qui signifie « Planète Terre » en japonais).

Livré en 2005, le Chikyu a une capacité de forage de 7 000 mètres à partir du fond de la mer. Équipé d’un riser (élément qui permet de contrôler toute remontée inopinée de gaz), le Chikyu peut forer dans des secteurs à risque. Objectif pour les Japonais : se prémunir au mieux des risques naturels. Le Japon est en effet à la jonction de quatre plaques tectoniques, il enregistre environ 20 % des tremblements de terre les plus violents dans le monde.

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Le navire de forage Chikyu © JAMSTEC

Financé par le JAMSTEC, le Chikyu est au service de la communauté internationale dans le cadre du programme de forages océaniques (IODP – Integrated Ocean Drilling Program).

Entre 2007 et 2008, Masahiko IDA est nommé Directeur du département opérations navales. Il est depuis 2008 expert auprès du Centre de technologie et d’ingénierie maritime (Marine Technology and Engineering Center, MARITEC).

Masahiko IDA a réalisé 210 plongées à bord du Shinkai 2000 et 61 à bord du Shinkai 6500.

Masahiko IDA © JAMSTEC (1)
Masahiko IDA © JAMSTEC

« Le Japon est situé dans l’une des zones les plus géologiquement actives du monde, et notre rôle, au JAMSTEC, est de faire comprendre les interactions entre l’Océan, la Terre, la vie et les activités humaines. […] Notre compréhension de l’Océan est la clé pour réussir à faire face au séisme et au tsunami survenus en 2011, et pour nous préparer aux futures grandes catastrophes naturelles qui surviendront. »