Tara Oceans Polar Circle : cap sur l’Arctique pour une récolte unique de plancton

07/08/2013

Le 19 mai dernier, le bateau Tara a levé l’ancre et quitté Lorient, entamant ainsi une nouvelle expédition : Tara oceans Polar Circle.

Au programme, une circumnavigation de l’océan Arctique d’une durée de 7 mois, en empruntant les passages du Nord-Est et du Nord-Ouest. Objectif de cette expédition, mieux connaître l’écosystème arctique en partant à la découverte des espèces planctoniques méconnues et en tentant de décrypter leurs interactions avec le milieu.

 Parachevant ainsi l’ambition de l’expédition Tara Oceans (2009-2012) qui était de récolter du plancton dans tous les océans du monde, Tara Oceans Polar Circle s’intéressera également à d’autres problématiques propres à cette région sensible aux changements climatiques, au moment même où l’on assiste à une fonte accélérée de la banquise arctique en été.

« A ce jour, deux bateaux ont réalisé la circumnavigation de cet océan », rappelle Etienne Bourgois, président de Tara Expéditions et directeur général de la marque de vêtements Agrès b, partenaire majeur de cette aventure depuis son lancement aux côtés de la Fondation Prince Albert II de Monaco, du CNRS, du CEA et de l’European Molecular Biology Laboratory (EMBL).

Plus de 20 000 kilomètres vont ainsi être parcourus par ce voilier « conçu pour ces contrées », souligne-t-il. Tara va emprunter successivement le passage du Nord-Est, côté russe, et le passage du Nord-Ouest, côté Canada et Etats-Unis. « Naviguer dans les eaux russes n’est pas toujours simple. Or l’une des nouveautés de ce projet sera de pouvoir faire de la science dans ces eaux », explique le président de Tara Expéditions qui tient à remercier les autorités russes et le soutien, en particulier diplomatique, de la Fondation Prince Albert II de Monaco.

Peu d’escales sont prévues au programme de Tara, mais en revanche, les scientifiques vont avoir du pain sur la planche avec un énorme travail d’échantillonnage du plancton, en particulier au bord de la banquise que ce voilier va frôler. Il s’agit pour les scientifiques d’effectuer une étude intégrée et pluridisciplinaire des écosystèmes marins arctiques afin de mieux comprendre leur évolution en cours et futur. Ces données sont d’autant plus importantes pour les chercheurs que l’écosystème planctonique, des virus aux larves de poissons, n’est pas encore trop impacté par les prélèvements industriels. Aussi reste-t-il un bon indicateur des changements.

Des changements qui n’ont cessé d’affecter cette région de l’Arctique au cours de ces dernières décennies. « L’extension maxi de la banquise atteignait les 16 millions de km2 à la fin des années 1970 alors qu’aujourd’hui elle se situe plutôt entre 14 et 15 millions de km2. Quant au creux en été qui était de 8 millions de km2 en 1979, il est descendu à 6 millions de km2 au milieu des années 2000 et a atteint les 3 millions de km2 en 2012″, rappelle Jean-Claude, directeur de recherche émérite CNRS au sein du Laboratoire d’océanographie et du climat (LOCEAN/IPSL-CNRS/UPMC/IRD/MNHN).

Autrement dit, l’extension de la banquise en été à diminué de plus de la moitié de ce qu’elle était il y a une trentaine d’années. « Les changements en cours en Arctique sont très impressionnants et il est urgent d’aller dresser un état des lieux », explique Chris Bowler, directeur de recherche CNRS au sein de l’Institut de biologie de l’Ecole Normale Supérieure (CNRS/ENS), et médaille d’argent 2010 du CNRS.

En parallèle de l’approche biologique globale développée par cette expédition, d’autres sujets vont donc être traités. Ainsi les chercheurs vont chercher à évaluer les taux de mercure présent dans l’atmosphère et dans la mer ou encore la concentration de particules de plastiques. « Il s’agira de comprendre quelle est la vulnérabilité de la biodiversité polaire aux activités humaines, comment la fonte de la banquise impacte l’écosystème polaire marin et quelles pollutions s’immiscent dans ces régions reculées ».

Mais au-delà du travail purement scientifique qui va être mené, la présence du voilier Tara dans l’Arctique sera aussi l’occasion de s’adresser aux acteurs politiques et au monde économique et de sensibiliser la société aux enjeux écologiques les plus urgents de cette région ainsi qu’aux problématiques rencontrées par les populations autochtones du cercle polaire arctique. Car si pour certains, l’ouverture des routes maritimes, le développement de la navigation et les opportunités de pêche sont des atouts économiques, pour d’autres ces changements en marche comportent un risque écologique.

BE France numéro 281 (3/06/2013) – ADIT / ADIT –

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