Prix Nobel de chimie pour une protéine fluorescente identifiée chez la méduse

11/10/2008

Mercredi 8 octobre, à Stockholm, le prix Nobel de chimie a été décerné à Osamu Shimomura, Martin Chalfie et Roger Y.Tsien pour la découverte et l’utilisation de la protéine fluorescente verte, la GFP.
Elle a été identifiée au début des années 1960, par Osamu Shimomura, chercheur japonais recruté par l’université américaine de Princetone. Il s’intéresse alors à la lumière bleue-verte émise par une méduse américaine, l’ Aequorea victoria, lorqu’elle est en mouvement.

Il décide de tenter d’isoler la substance responsable de cette luminescence et ne se doute alors sûrement pas de la portée importante qu’allaient avoir ses travaux par la suite.
Il utilise un procédé qui peut paraître archaïque (il écrase pas moins de 10 000 spécimens afin d’obtenir la quantité nécessaire de cette substance !) mais sachons qu’à l’époque, il n’existe pas de technique d’amplification moléculaire…

Il réussit ainsi à isoler la protéine qu’il baptise aequorine et démontre que si la luminescence n’apparaît que lorsque la méduse s’agite, c’est parce que la molécule n’émet de la lumière bleue-verte que quand elle est en contact avec le calcium qui se diffuse dans l’organisme quand l’animal est en mouvement.

Le chercheur remarque également la présence infime mais récurrente d’une autre substance luminescente qu’il baptise Green Fluorescent Protein, ou GFP. La concentration de cette molécule est si faible que c’est incroyable qu’il ait pu l’isoler à cette époque ; sans la grande quantité de chair de méduses étudiée, il n’aurait pas pu le faire.

Dans les années 1970, il montre que cette protéine porte en elle un chromophore, un groupe chimique qui absorbe et émet de la lumière et comprend que c’est en absorbant la lumière bleue de l’aequorine que la GFP émet une lumière verte.

30 ans plus tard, Martin Chalfie, spécialiste américain de physiologie d’un petit ver transparent (Caenorhabditis elegans), décide de se servir de la GFP comme outil de marquage pour comprendre le fonctionnement des protéines dans l’organisme. Grâce à un de ses collègues, Douglas Prasher, à qui il demande d’isoler le gène codant pour la GFP, il réussit à colorer 6 cellules du ver transparent en introduisant ce gène dans le matériel cellulaire. Il insère ce gène dans des neurones impliqués dans la perception tactile du ver qu’il étudie, et en éclairant l’animal d’une lumière ultraviolette ou bleue, il peut alors rendre luminescents ces neurones et suivre les mouvements des protéines marquées.

Peu après, Roger Tsein développe des GFP de couleurs différentes : on passe du noir et vert à la couleur. Ce raffinement permet aux biologistes de suivre le trajet de plusieurs protéines en même temps ainsi que leurs interactions. Il s’agit d’une révolution technique en biologie. Certains surnomment même cette protéine le microscope du 21e siècle !

Cette méthode dont l’emploi s’est généralisé permet aujourd’hui d’observer des processus auparavant invisibles comme la croissance des cellules nerveuses dans le cerveau ou la propagation des cellules cancéreuses.

Source : La Cité de la Mer
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/fondamental/20081008.OBS4893/une_proteine_a_lhonneur.html?idfx=RSS_sciences