La marée était en noir : le projet de loi climatique aux Etats-Unis menacé par les forages offshores

03/05/2010

La plateforme pétrolière, située à 70 km du littoral de la Louisiane, qui a pris feu suite à une explosion le mardi 20 avril dernier, a entrainé la perte des infrastructures 48 heures plus tard. L’accident est depuis à l’origine d’une fuite d’hydrocarbures de près de 160.000 litres journaliers de brut, résultant du non fonctionnement d’une vanne automatique située en profondeur. En l’absence d’intervention, l’épanchement d’hydrocarbures dans l’océan pourrait continuer pendant plusieurs mois.

Outre les 11 morts qu’il a causés, l’accident devrait présenter un bilan environnemental important, la nappe de pétrole n’étant plus qu’à une vingtaine de kilomètres du delta du Mississipi, lequel abrite près de la moitié des zones humides du pays. Cet événement pourrait par ailleurs assombrir les perspectives des projets de législation climatique et énergétique, actuellement en cours d’élaboration au Sénat et qui prévoient le développement de forages offshores.

Les causes de l’accident ne sont toujours pas connues, et une commission créée par le Département de l’Intérieur et le Département de la Sécurité Intérieure est chargée de mener l’enquête. Dans l’immédiat, la catastrophe pose deux problèmes de taille, à savoir le colmatage des fuites au niveau des tubes de forage et la gestion des quantités déjà déversées dans l’océan.

Concernant le colmatage des fuites, les premières interventions robotiques menées par BP n’ont pu enrayer la situation. Parmi les autres solutions proposées, l’une d’entres-elles consisteraient à placer un couvercle au dessus de la conduite de pétrole au fond de la mer. Actuellement en cours de fabrication, la pièce pourrait être mise en place dans un délai de 2 à 4 semaines. Cette solution n’a cependant jamais été testée et sa réussite est donc incertaine. Une autre solution consisterait à forer un second conduit à proximité et à injecter un mélange de ciment destiné à boucher le puits endommagé. Cette solution nécessite cependant 2 à 3 mois de mise en oeuvre.

Le deuxième problème consiste à gérer les quantités de pétrole déversées qui dérivent lentement vers le littoral. Une des solutions envisagées est le brûlage de la nappe en mer, avant qu’elle n’atteigne les côtes. Sur ce point les autorités américaines sont tiraillées entre l’impact de la pollution sur les bayous et la pollution atmosphérique qu’engendrerait la combustion du pétrole en mer. Compte tenu des aspects économiques, il semble cependant que ce soit la seconde solution qui ait été retenue.

Cet événement arrive à peine un mois après la déclaration du président Barack Obama indiquant sa volonté de développer les forages offshores. Souhaitant réduire la dépendance du pays vis-à-vis des importations d’hydrocarbures et s’assurer le soutient de sénateurs pour l’adoption d’un texte législatif portant sur la régulation des GES (Gaz à Effet de Serre), le président avait en effet annoncé l’ouverture d’un certain nombre de zones maritimes à l’exploitation pétrolière. Alors que le projet de loi actuellement en cours de rédaction par le Sénat se trouve récemment fragilisé en raison du retrait d’un des sénateurs instigateurs du projet, cet accident amoindrit d’autant plus la probabilité de voir aboutir une législation climatique aux Etats-Unis. En effet, depuis l’accident, plusieurs sénateurs ont émis des réserves sur cette nouvelle stratégie énergétique, en partie basée sur le déploiement du nucléaire, des forages offshores et des technologies CCS pour les centrales électriques fonctionnant au charbon.

Dans l’ensemble, les états côtiers sont les premiers à avoir manifesté leur scepticisme concernant le développement des forages offshores. Ces derniers ont ainsi appelé à un renforcement des normes de sécurité. Si la Maison Blanche a confirmé la nécessité d’entreprendre des études de risques approfondies avant la délivrance de chaque permis de forage offshore, celle-ci n’est cependant pas revenue sur sa stratégie énergétique initiale, à savoir l’ouverture de nouvelles zones maritimes à l’exploitation pétrolière.

Source : BE Etats-Unis numéro 205 (30/04/2010) – Ambassade de France aux Etats-Unis / ADIT
http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/63196.htm