Une expérience unique pour comprendre les impacts de l’acidification des océans

14/04/2013

De janvier à juin 2013, plus de 60 chercheurs européens vont conduire, au large de la côte ouest de la Suède, la plus importante expérimentation jamais réalisée sur l’impact du changement climatique sur les écosystèmes marins. Cela constitue une expérience unique et une 1re mondiale. Afin d’étudier les effets de l’acidification de l’océan (baisse du pH de l’eau de mer due à une absorption des émissions de Dioxyde de carbone (CO2) d’origine anthropique par les océans) sur les communautés planctoniques et halieutiques, les scientifiques ont mis en place une dizaine de mésocosmes (dispositifs expérimentaux clos, de taille moyenne, destinés aux études écologiques) dans le fjord de Gullmar.

Cette expérimentation se déroule dans le cadre d’un projet allemand sur l’acidification des océans baptisé BIOACID (Impact biologique de l’acidification des océans) et coordonné par Ulf Riebesell, professeur d’océanographie au Centre GEOMAR Helmholtz pour la recherche sur les océans. Des études similaires ont été menées précédemment dans l’environnement polaire, au large d’Hawaï et au large des côtes finlandaises et norvégiennes, mais elles étaient à court terme et portaient sur de plus petites échelles.

Si les réponses de différentes espèces à l’acidification des océans ont déjà été étudiées, les réactions des communautés biologiques dans leur ensemble sont encore mal connues. C’est pour combler cette lacune que sont utilisés les mésocosmes : ils permettent d’étudier l’ensemble d’une communauté dans son environnement naturel et sur une longue durée.

Les dix mésocosmes, déployés à partir du bateau ALKOR dans le fjord suédois sont d’énormes containers en plastique en forme de tube. Ils font 20 mètres de haut et contiennent chacun 55 000 litres d’eau de mer dans lesquels vivent de nombreux organismes planctoniques. Dans la moitié des containers, différentes concentrations de dioxyde de carbone seront testées et, durant 5 mois, les équipes de recherche vont suivre les réponses du phyto- et du zooplancton à ces différentes acidités.

Cette expérience permettra également d’étudier l’effet de l’acidification sur le développement des poissons. En effet, si les communautés planctoniques, situées à la base de la chaîne alimentaire, subissent des changements, on peut s’attendre à ce que l’ensemble du réseau trophique soit touché. Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs ont relâché des larves de hareng et de morue dans les mésocosmes et vont suivre leur développement en lien avec le degré d’acidification.

Les chercheurs originaires de Suède, d’Allemagne, de Finlande, de Grande Bretagne et des Pays-Bas ont choisi le centre Sven Lovén pour les sciences marines comme camp de base durant cette expérience. A partir de cette infrastructure située à Kristineberg, ils se rendront quotidiennement sur le site accueillant les mésocosmes pour prélever des échantillons et effectuer des mesures. Depuis fin janvier, les chercheurs tiennent également un blog sur leurs travaux : le blog KOSMOS 2013 publié sur le site internet de BIOACID.

Cette étude s’intéresse au processus d’adaptation dans l’environnement naturel. Les résultats obtenus pourraient permettre de faire de meilleures prévisions quant aux conséquences à long terme de l’acidification des océans et ainsi avoir un impact majeur sur les futures décisions politiques.

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Court film réalisé par le Centre GEOMAR Helmholtz sur l’étude menée au Svalbard avec les mésocosmes – « Ocean Acidification: An Ecosystem Facing Dissolution » (vidéo en anglais) Crédits : GEOMARKiel